Le droit sur la marque est un droit exclusif qui assure un monopole à son titulaire et l'assurance d'une protection contre les concurrents, parfois contre les entreprises de secteurs d'activité différents.


Droit d'interdire l'usage de la marque – Le droit sur la marque permet à son titulaire d'interdire l'exploitation de sa marque. L'article 16§1 ADPIC prévoit que le titulaire d'une marque enregistrée aura le droit exclusif :

  • d'empêcher tous les tiers agissant sans son consentement
  • de faire usage au cours d'opérations commerciales
  • de signes identiques ou similaires
  • pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée
  • dans les cas où un tel usage entraînerait un risque de confusion, étant précisé qu'en cas d'usage d'un signe identique pour des produits ou services identiques, un risque de confusion sera présumé exister.

Les actes interdits s'ils comportent un risque de confusion : Ex : L'imitation de la marque pour des produits ou services identiques telle qu'un risque de confusion est possible entre les produits (marques jugées imitantes "La Vache sérieuse" v/ "la Vache qui Rit" par imitation intellectuelle), "pages soleils" v/ "pages jaunes", "Pronovias" v/ "Pronuptia" (imitation par synonymie) ; la reproduction à l'identique ou l'imitation de la marque pour des produits ou services similaires à ceux protégés.

Pour obtenir une sanction de tels comportements, et protéger la marque dans sa fonction distinctive, le titulaire de la marque dispose de l'action en contrefaçon qui, suivant les pays, sera une action judiciaire ou administrative.

Sur le fondement de la concurrence déloyale, le titulaire de la marque peut également faire sanctionner des atteintes à la valeur de la marque, comme celles résultant de la pratique des tableaux de concordance, ou des conditions de revente préjudiciables au titulaire de la marque, comme le fait de délaver des jeans par ex., ou de l'usage de la marque par un journaliste ...

Etendue de la protection –  Deux grands principes doivent être retenus :

  • Le principe de territorialité : le monopole sur la marque ne peut être opposé aux tiers que sur le territoire pour lequel l'enregistrement a été obtenu. Un enregistrement obtenu en Espagne ou en France ne peut permettre en principe d'agir en contrefaçon en Chine ou aux Etats-Unis.
  • Le principe de spécialité : l'enregistrement de la marque ne confère de monopole qu'à l'égard des produits ou services énumérés dans la demande d'enregistrement et aux produits et services qui leur sont similaires. C'est pourquoi peuvent en principe coexister deux marques identiques déposées pour des produits ou services différents, à l'instar des marques "Mazda", l'une déposée pour des voitures, l'autre pour des piles électriques ou "Mont-Blanc" , l'une pour des stylos, l'autre pour une crème dessert. Des produits et services sont jugés similaires lorsque la clientèle leur attribue la même origine en raison de leur nature, de leur destination, de leur mode de production. Ont ainsi été jugés similaires les chaussures et les vêtements, des bateaux et des planches à voile.
  • Le principe de la protection, non seulement contre la reprise à l’identique du signe constituant la marque, mais également contre l’imitation prêtant à confusion, comme par exemple "La Vache sérieuse" v/ "la Vache qui Rit", "pages soleils" v/ "pages jaunes", "Pronovias" v/ "Pronuptia" en raison des similitudes intellectuelles.

La protection étendue de la marque notoire ou de haute renommée – Ces deux principes de base connaissent une seule exception : les marques notoires ou de haute renommée (("Marks having a high reputation", en anglais, "berühmte Marke" en allemand), à savoir celles connues d'une très large fraction du public. Ces marques jouissent d'une telle notoriété sur le marché considéré qu'elle bénéficient, dans de nombreux pays, d'une protection privilégiée, étendue à un territoire ou à des produits ou services pour lesquels la marque n'est pas enregistrée, ni même utilisée.

Cette protection renforcée est essentiellement destinée à empêcher les sociétés de tirer indûment parti de la réputation d’une marque notoire ou de porter atteinte à sa réputation ou à son image. On comprend naturellement que les messages véhiculés par une marque renommée et qui lui sont rattachés dans l'esprit d'un public large confèrent à celle‑ci une valeur importante et digne de protection, et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, la renommée d’une marque est le résultat d’efforts et d’investissements considérables de son titulaire (cf. TPI affaire T215-03).

Au niveau international, la protection renforcée des marques notoires est prévue par :

  • l'article 6bis de la Convention de Paris : "Les pays de l’Union s’engagent (...) à refuser ou à invalider l’enregistrement et à interdire l’usage d’une marque (...) qui constitue la reproduction, l’imitation ou la traduction, susceptibles de créer une confusion, d’une marque que l’autorité compétente du pays de l’enregistrement ou de l’usage estimera y être notoirement connue comme étant déjà la marque d’une personne admise à bénéficier de la présente Convention et utilisée pour des produits identiques ou similaires."
  • l'article 16§2&3 ADPIC (Accord relatif aux aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, y compris le commerce des marchandises de contrefaçon) : "l'article 6bis de la Convention de Paris (1967) s'appliquera, mutatis mutandis, aux produits ou services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels une marque de fabrique ou de commerce est enregistrée, à condition que l'usage de cette marque pour ces produits ou services indique un lien entre ces produits ou services et le titulaire de la marque enregistrée et à condition que cet usage risque de nuire aux intérêts du titulaire de la marque enregistrée".

Exemple : supposons que HOLE 19 soit la marque d’une célèbre chaîne de magasins de sport. HOLE 19 bénéficierait automatiquement de la protection dans les pays où les marques notoires jouissent d’une protection plus solide et où la marque est notoirement connue pour les magasins de sport. La protection pourrait aussi s’étendre à des produits et services sans rapport avec cette boisson si certaines conditions sont réunies. Il s’ensuit que, si une autre société décide de commercialiser d’autres produits, aussi variés que des boissons ou des magasines, sous la marque HOLE 19, elle devra obtenir l’autorisation du propriétaire de cette marque, sous peine de risquer des poursuites pour atteinte aux droits attachés à la marque.

La Cour de justice de l'Union européenne a eu l'occasion de donner une définition claire de l'étendue de la renommée nécessaire au bénéfice de la protection renforcée : « le public parmi lequel la marque antérieure doit avoir acquis une renommée est celui concerné par cette marque, c'est-à-dire, en fonction du produit ou du service commercialisé, soit le grand public, soit un public plus spécialisé, par exemple un milieu professionnel donné. (...) Le degré de connaissance requis doit être considéré comme atteint lorsque la marque antérieure est connue d'une partie significative du public concerné par les produits ou services couverts par cette marque. (...) Dans l'examen de cette condition, le juge (...) doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l'intensité, l'étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l'importance des investissements réalisés par l'entreprise pour la promouvoir. Au plan territorial, (...) il ne peut être exigé que la renommée existe dans tout le territoire de l'État membre. Il suffit qu'elle existe dans une partie substantielle de celui-ci. » (Cour de justice de l'Union européenne, Affaire C-375/97)

Pour déterminer si une marque de fabrique ou de commerce est notoirement connue, il est tenu compte de la notoriété de cette marque dans la partie du public concernée, y compris la notoriété dans le pays concerné obtenue par suite de la promotion de cette marque.  (art 16§2 ADPIC)

Publicité comparative – En revanche, la publicité comparative est autorisée dans certains pays et sous certaines conditions. Le droit de marque ne permet alors pas de s’opposer à l’utilisation d’un signe identique ou similaire à une marque dans une publicité comparative s’il n’y a pas de risque de confusion dans l’esprit du consommateur, entre l’annonceur et le titulaire de la marque ou entre les marques, biens ou services de l’annonceur et ceux du titulaire de la marque.

En Europe, la directive sur la publicité comparative (Directive 2006/114/CE du Parlement européen et du Conseil) prévoit que la publicité comparative est licite dès lors qu'elle respecte les conditions suivantes:

  • elle n'est pas trompeuse;
  • elle compare des biens ou services répondant à des besoins identiques ou ayant le même objectif;
  • elle compare objectivement des caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie;
  • elle n'engendre pas de confusion sur le marché entre l'annonceur et un concurrent;
  • elle n'entraîne pas le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux ou autre signe distinctif d'un concurrent;
  • lorsqu'elle concerne des produits ayant une appellation d'origine, elle se rapporte à des produits ayant la même appellation;
  • elle ne tire pas profit indûment de la notoriété attachée à une marque ou à un autre signe distinctif d'un concurrent;
  • elle ne présente pas un bien ou un service comme une imitation ou une reproduction d'un bien ou d'un service portant une marque ou un nom commercial protégé.