Tout projet de R & D profitera d'une étude efficace de l'état de l'art. Cette étude ne devrait pas seulement se limiter à des ouvrages et des revues scientifiques, mais devrait aussi prendre en compte l'information technique souvent détaillée que renferment les brevets. Cette recherche parmi les brevets est d'autant plus souhaitable qu'elle permet de choisir une voie libre d'exploitation vis-à-vis des brevets éventuellement déjà pris par la concurrence et dont la découverte tardive peut coûter très cher. Encore faut-il être capable de lire le contenu des brevets. Décryptage d'un document en réalité très structuré.


Le système des brevets est source d'information abondante et à jour sur la technologie appliquée. Les brevets contiennent des informations techniques détaillées qui souvent ne peuvent être trouvés nulle part ailleurs : jusqu'à 80% des connaissances techniques ne peuvent être trouvées que dans les documents de brevet. En outre, cette information est rapidement disponible, puisque la plupart des demandes de brevet sont publiées 18 mois après le premier dépôt, quel que soit leur pays d'origine.

Une recherches dans la littérature brevet peut être effectuée par toute personne à l'aide notamment du site internet esp@cenet sur les brevets. Il donne accès à plus de 60 millions de documents de brevet du monde entier. Tous les documents sont classés par domaines technologiques, sur la base de la classification internationale des brevets.

Un brevet comporte essentiellement trois parties :

  • la page de garde contenant les informations juridiques telles que les dates, numéros, inventeurs et propriétaires du brevet,
  • la description destinées à convaincre le lecteur (essentiellement l'examinateur et le juge) que les conditions de brevetabilité, en particulier l'inventivité et la suffisance de description, sont respectées : la première partie du brevet est le mémoire descriptif, où l'on brosse un tableau de l'état de la technique à la date de dépôt de la demande de brevet, où l'on présente le sommaire de l'invention, tandis que la seconde partie de la description décrit, avec si possible des figures, un ou plusieurs modes de réalisation préférés de l'invention,
  • les revendications qui constituent la base juridique de la protection d'une invention en ce qu'elles délimitent l'étendue de la protection conférée par le brevet.

La page de garde

WO2007044825_11. Date de dépôt - Il s'agit de la date à laquelle la demande de brevet a été déposée. Cette date est très importante : seules peuvent être citées comme antériorités opposables au brevet les divulgations antérieures à la date de dépôt de la demande de brevet.

2. Numéro de dépôt - Un numéro de série est attribué à une demande de brevet lors de son dépôt.

3. Priorité - Le brevet peut bénéficier d'un droit de priorité d'une demande antérieure pour la même invention. Cela a pour effet que la date de dépôt ( "date effective") est réputée être la date de dépôt de la demande antérieure aux fins de déterminer l'état de la technique opposable au brevet. Lorsqu’une telle « priorité » est revendiquée, la date de dépôt, le pays et le numéro de dépôt de cette demande antérieure sont indiquées dans le champ « priorité ».

4. Date de publication - La date de publication est la date à laquelle le document de brevet est mis à la disposition du public, rejoignant ainsi l'état de la technique. Cette date est généralement postérieure de 18 mois à la date de dépôt ou de priorité du brevet, sauf si le déposant demande la publication anticipée du brevet.

5. Numéro de publication - Un second numéro de série, qui diffère du numéro de dépôt (2), est attribuée au document de brevet mis à la disposition du public.

6. Inventeur(s) - Le brevet doit comporter la désignation du ou des inventeurs, personnes physiques, de l’invention objet du brevet. L’ordre de désignation des inventeurs ne confère aucun droit particulier.

7. Demandeur(s) ou cessionnaire(s) - Le demandeur ou le cessionnaire est le propriétaire (on dit aussi « titulaire ») du brevet. Le droit au brevet appartient à l’inventeur, mais peut être transféré à une autre personne physique ou morale. La question du droit au brevet est traitée plus en détail ici.

8. Titre - Le titre du brevet doit décrire succintement l'objet de la demande de brevet.

9. Domaines de recherche - L'Office des brevets utilise un système de classification pour classer les technologies. Les classes sont utile pour effectuer des recherches d’antériorités ou thématiques.

10. Abrégé / 11. Dessin d’abrégé - Un abrégé et un dessin d'accompagnement aident les lecteurs à déterminer rapidement si le brevet concerne une matière qui les intéresse. L’abrégé n'a pas de valeur juridique pour déterminer la portée du brevet.

Description

La description expose:

  • le domaine technique de l’invention et son application industrielle,
  • l’état de la technique antérieure,
  • le problème technique à résoudre et la solution apportée par l’invention, avec, le cas échéant ses avantages,
  • une brève description des dessins,
  • une description détaillée d’au moins un mode de réalisation de l’invention.

WO2007044825_312-13. Domaine et arrière-plan technologique de l'invention - En préambule de l’exposé de l'invention, il est tout d’abord décrit l'état de la technique avant l'invention et le problème résolu par l'invention au vu de cet état de la technique. Si, selon le mot d'Albert Einstein, un problème sans solution est un problème mal posé, il est parfois essentiel, dans un brevet, que le problème soit bien exposé pour que la solution soit bien comprise et appréciée quant à sa contribution à l’état de la technique.

14. Objet de l'invention - L’objet de l’invention est énoncé dans une brève description des principales caractéristiques de l'invention formulée en termes généraux ne faisant pas référence aux dessins. Cette partie peut également expliquer comment l'invention fonctionne et comment la combinaison de ces caractéristiques principales vont résoudre le problème.

15. Brève description des dessins - La brève description des dessins permet au lecteur de déterminer ce qu'il est en train de regarder sans avoir besoin de se référer d’emblée à la description détaillée de l'invention.

16. Description détaillée de la solution préférée - Cette partie du brevet comprend une description détaillée de l'invention faisant généralement référence aux dessins et donnant suffisamment d'informations pour que l’homme du métier soit en mesure de réaliser et d'utiliser le meilleur mode de réalisation de l'invention connu défini par l’inventeur au moment du dépôt.

La description d'une invention n'est pas un énoncé du concept de l'invention. Un énoncé simple des résultats ou des avantages d'une invention ne constitue pas, en soi, une description de cette invention.

La description doit décrire comment l'invention fonctionne. Elle décrit les différents composants, comment ces composants sont reliés entre eux, ainsi que le fonctionnement de l'ensemble. Pour ce qui est des procédés, la description doit décrire chacune des étapes du procédé.

Les revendications : définition et limite de votre propriété

17. Revendications - Les revendications constituent la partie juridiquement contraignante du brevet. Les revendications délimitent l'étendue de la protection en indiquant les caractéristiques de l'invention que l'on souhaite protéger. Un titulaire du brevet a seulement la droit d’empêcher d'autres personnes de fabriquer, d'utiliser, de vendre, d'offrir à la vente, d'importer ou d'exporter ce qui est revendiqué dans le brevet. Le simple fait d’illustrer sur les dessins ou de décrire dans un paragraphe une idée ou une caractéristique ne confère sur celle-ci aucune protection.

La règle est donc que seuls sont considérés comme des contrefaçon du brevet les dispositifs ou les procédés qui reproduisent la combinaison de moyens techniques revendiquée.

Cette règle est nuancée par la doctrine des équivalents en application de laquelle la contrefaçon est également sanctionnée si les différences avec le produit ou procédé revendiqué ne sont pas substantielles. Il en est ainsi en particulier lorsque l'un des éléments techniques revendiqués se retrouve dans la contrefaçon sous une forme différente, mais en y exerçant la même fonction pour un résultat de même nature.

La doctrine des équivalents ne doit cependant pas permettre d'étendre indûment  la portée des revendications.

Aux Etat-Unis en particulier, l'application de la doctrine des équivalents par les juges est restrictive. Ainsi :

  • Une variante décrite dans le brevet mais non couverte par les revendications ne sera pas protégée grâce aux équivalents.
  • Si, au cours de la procédure de délivrance, le propriétaire du brevet a limité la portée d'une revendication pour prendre en compte un document de l'art antérieur, il ne peut pas utiliser la doctrine des équivalents pour retrouver la portée initiale de sa revendication.
  • Depuis l'affaire Festo, le titulaire du brevet qui a été amené à modifier une revendication de son brevet au cours de la procédure de délivrance et qui souhaite s'opposer à une contrefaçon par équivalence, a la lourde tâche de démontrer qu'il n'a pas renoncé à la matière qui se trouve hors du champ d'application de la revendication modifiée. De ce fait les déposants américains ont aujourd'hui tendance à multiplier le nombre de revendications dans l'espoir d'en conserver le plus grand nombre intactes de manière à être en mesure d'y appliquer ultérieurement la doctrine des équivalents.

WO2007044825_2118. Revendication indépendante - Le jeu de revendications comprend au moins une revendication indépendante (au moins la revendication 1) indiquant les caractéristiques essentielles de l'invention et donnant la protection la plus large. Il peut y avoir plusieurs revendications indépendantes définissant différentes aspects ou différentes composantes de l'invention.

En Europe, chaque revendication indépendante comprend:

  • une partie préambule désignant l'objet de l'invention et les caractéristiques techniques de l'invention qui sont déjà connues,
  • une partie caractérisante précédée par l'expression du type «caractérisé en ce que» et qui exposent les caractéristiques techniques nouvelles de l'invention revendiquée.

19. Revendication dépendante - Le jeu de revendications comprend généralement plusieurs revendications dépendantes (les sous-revendications) protégeant des caractéristiques secondaires de l'invention. Une revendication dépendante comprend toutes les limitations de la revendication indépendante à laquelle elle se rattache, ainsi que les limitations (caractéristiques techniques) additionnelles contenues dans la revendication dépendante. Si quelqu'un trouve une façon de contourner une revendcation indépendante en s’abstenant d’en reproduire au moins une caractéristique, ce contournement vaut alors nécessairement pour les sous-revendications qui dépendent de cette revendication indépendante.